22.03.2022 Finance Luxembourg Sustainability

Un vent mauvais venu de l'Est

Alors que l’horizon s’éclairait sur le front de la pandémie, l’Europe voit se dérouler une guerre à ses portes. Les conséquences du conflit qui oppose actuellement la Russie et l’Ukraine, au-delà de dégâts désastreux sur le plan humain, viennent renforcer les inquiétudes liées à l’inflation et aux difficultés d’approvisionnement.

La baisse prononcée des infections et des hospitalisations liées au COVID-19 en zone euro au cours du mois de février a débouché sur un allègement notable des mesures de restriction. Les perspectives d’activité se sont cependant largement détériorées depuis, du fait des conséquences de l’intervention militaire russe en Ukraine (débutée fin février).

L’un des effets les plus immédiats de cette crise a été une nouvelle poussée de fièvre des prix de l’énergie. Les prix du pétrole et du gaz naturel se sont particulièrement emballés sur la première semaine de mars, avec des répercussions très rapides sur les prix des carburants. Cette hausse s’est partiellement résorbée depuis, mais les cours devraient continuer à faire preuve d’une grande volatilité au gré des développements du conflit. Les prix de nombreuses matières premières ont également été impactés à la hausse, notamment dans le domaine des métaux (la Russie fournit à l’Europe de l’aluminium, du nickel, du titane et du palladium) et des céréales (la Russie et l’Ukraine prises ensemble représentent 20 à 25% des exportations mondiales de blé, de maïs et d’orge).

Les craintes vis-à-vis de l’inflation, déjà bien présentes avant le début du conflit (cf. Conjoncture Flash du mois de février), s’en voient renforcées. De mêmes que celles à propos des difficultés d’approvisionnement, notamment par le biais des mesures d’embargo – déjà effectives ou projetées – visant la Russie. L’Europe doit faire face à un dilemme cornélien concernant sa politique énergétique, puisqu’elle souhaite réduire sa dépendance vis-à-vis des approvisionnements russes (particulièrement forte pour certains Etats membres de l’UE) sans que cela ne nuise trop au pouvoir d’achat de ses citoyens et aux coûts subis par ses entreprises, et ceci sans sacrifier drastiquement ses objectifs en matière d’émissions (donc sans réorientation massive vers le charbon)

Des effets indirects potentiellement importants pour la zone euro (et le Luxembourg)

Les exportations européennes ne devraient pas trop souffrir directement de cette crise, car les flux à destination de la Russie et de l’Ukraine sont plutôt marginaux1 . C’est également le cas du Luxembourg, pour lequel les parts de marché à l’exportation vers ces deux pays s’élevaient sur les dernières années à seulement 1% respectivement 0.1% pour les biens (selon les données du commerce extérieur) et 0.2% respectivement 0.1% pour les services (données de la balance des paiements).

En revanche l’impact indirect via la hausse des prix à la production et à la consommation pourrait endommager significativement la demande. Des mesures de soutien, visant principalement à alléger la facture énergétique des ménages, sont progressivement déployées dans les différents pays de la zone euro, ce qui ne sera pas sans impact sur les finances publiques, déjà fortement éprouvées par la crise sanitaire. Après un repli marqué au début de l’intervention russe en Ukraine, les indices boursiers ont opéré un redressement partiel. Ils devraient continuer à être perturbés par les incertitudes entourant la suite du conflit, un signal particulièrement négatif vu du Luxembourg où ils influencent considérablement les résultats des acteurs du secteur financier. La confiance des entreprises et des ménages devrait en outre pâtir du contexte actuel, avec des répercussions à attendre sur la consommation, l’investissement et les perspectives d’emploi. Les résultats déjà disponibles auprès du ZEW allemand pour l’enquête de mars accusent en effet sérieusement le coup.

Pour l’ensemble de la zone euro, les prévisions les plus récentes d’Oxford Economics (finalisées le 8 mars) tablent sur une croissance du PIB de 3.1% en 2022, ce qui constitue une révision à la baisse notable par rapport aux 3.9% encore escomptés en janvier. Un scénario alternatif plus pessimiste, avec des sanctions plus fortes à l’encontre de la Russie et – en représailles – des restrictions sur l’offre de gaz russe, déboucherait sur une croissance limitée à 2% en zone euro cette année.

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Source: STATEC